samedi 18 juin 2011

Si l'arbre m'était conté



A midi de temps en temps, lorsque le temps est doux, que mon humeur est au vagabondage, plutôt que de me rendre dans la salle bondée de la cantine, je traverse la route à quelque pas de là et je me fais une pause nature. Ce jour là, alors que je longeais la rivière, goutant la tranquillité de l'instant, je me suis posée là en bord de rivière, et j'ai entamé une conversation avec un autochtone, qui m'a conté son histoire...
"Je n'aie pas toujours été un être branchu et feuillu » me dit-il, « il y a bien longtemps, comme toi, je possédais des jambes et des bras..."
"Un jour après une longue marche, je me suis assis là, comme tu le fais aujourd'hui en bord de rivière, détendu et heureux. Alors que je me posais enfin , les pensées, les idées qui peuplaient mon esprit, elles aussi se sont arrêtées, elles se sont contemplés les une les autres, elles ont cessé de se battre, lassées de s'affronter...Et les mots ont surgi, se mêlant à la danse des flots de la rivière. Et les mots ont valsés, les mots rient bon, les mots dits, les mots lestés, les mots a se taire, les mots que rient, les mots d'elle, les mots bile, tout ces mots que l'on tait, ces mots non digérés, que l'on vomit sans cesse dans nos comportements, je les contemplais là, campé au bord de l'eau, je les voyais se verser, se noyer dans l'eau de la rivière. J'ai laissé le flot des dires intérieurs s'écouler sur la berge et s'immerger dans l'eau sombre et je suis resté là, sans mot dire, immobile absorbé par la contemplation muette des pensées inaudibles.
Et les heures, passaient, les jours, les années. Jamais, je ne me lassais de cette paix trouvée. Je sentais bien des fourmis dans mes jambes, mais je ne m'inquiétais pas, cela n'avait rien d'étonnant à force de rester là, statique, que mes jambes me démangent ainsi.
Un jour ne tenant plus j'ai tenté de me gratter et j'ai ressenti une raideur dans mes bras engourdis, pourtant j'étais très sensible au souffle du vent caressant le bout de mes doigts. J'ai alors essayé de me pencher pour regarder mes jambes et j'ai senti une rigidité dans mon cou. Je me suis, alors rendu compte de mon corps était  figé, immobile.  Mon regard perdu dans la coulé des eaux m'avait fait perdre la notion du temps et mon corps c’était  adapté a son nouvel environnement. En osmose avec la nature, des racines ont germées sur mes membres inferieurs, appendices tubulaires creusant l'entre de la terre pour chercher nourriture et  eau. Mon réseau capillaire artériel  et veineux c'est mué en canaux de sève transportant les fluides nourriciers issus de la terre, et de la transformation de l'énergie solaire. Mes membres supérieurs avaient également évolués se divisant en branches et en branchioles, au bout desquelles s'étendaient mes ramures gorgées de chlorophylle. J'étais devenu un être végétal, contemplatif, mon réseau sensitif également avait évolué et libéré du langage, de tout ses mots , et des filtres lexicaux, je pouvais à présent capter sans difficulté le langage de la nature, depuis le murmure du vent, jusqu'au chant des oiseaux en passant par le frémissement de la rosée matinale... "
Perdue dans mes pensées, je ne me lassais pas de l'écouter me conter sa vie depuis sa mutation végétale, et je me pris à rêver qu'un jour je serais arbre...
Puis j'ai senti des fourmis dans mes jambes... Vite !! Se lever, se dégourdir les jambes...et marcher !! Bouger, j'aime trop le mouvement ...
Et puis la pause est finie...

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